Vous êtes ici : Recherche et Avenir » A la Une » Festival Recherche & Société REA 2021 : Le transhumanisme, une perspective pour le futur de nos sociétés

 

Le transhumanisme est un courant de pensée à la frontière entre la Science et la Philosophie. Par sa connotation futuriste, il est assez commun de penser que ce dernier n’a vu le jour que récemment. Cependant, l’Histoire nous dit qu’il aurait en fait vu ses premiers jours en France au cours de l’année 1937. Le polytechnicien Jean Coutrot fut la plume et l’encre de ce mode de pensée : “L’ébauche d’un transhumanisme” ne paraîtra que deux ans plus tard. Ces travaux seront par la suite repris en 1951, de l’autre côté de l’Atlantique, par un biologiste Américain du nom de Julian Huxley. Il fera de ce courant l’un des débats de notre ère.

 

Défini par Julian Huxley comme étant “un homme qui reste un homme, mais se transcende lui-même en déployant de nouveaux possibles de et pour sa nature humaine”, le transhumanisme occupe une place prépondérante dans notre société. Ce principe de post-humain dépassant ses propres limites par les inventions qu’il met au goût du jour ouvre une infinité de possibilités à son avenir. Le dépassement de ses capacités par l’alliance de son corps à la technologie est au centre de nombreuses discussions scientifiques et philosophiques. De nos jours, le transhumanisme s’appuie sur le progrès de divers domaines tels que la médecine, la robotique, l’informatique et les sciences traitant de l’intelligence artificielle.

 

 

Afin de faciliter la compréhension du lecteur sur cette notion particulière, nous pensons qu’il est pertinent de lister les applications actuelles et futures du Transhumanisme pour l’individu et la société :

 

 

En médecine, une dévotion pour la transformation corporelle :

 

Les liaisons qu’entretient la médecine avec le concept de transhumanisme sont étroites. Beaucoup s’accordent à dire que le corps humain est d’ores et déjà entré dans l’ère du transhumanisme. Une telle affirmation se vérifie par la considération qu’éprouve la société à l’égard de la santé humaine : “la santé est un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité” (selon le préambule de la Constitution de l’OMS). La médecine anti-âge en est une illustration parfaite car elle repose sur un combat contre la vieillesse, mécanisme qui par nature s’applique à tout être vivant sur cette planète à l’exception de la méduse turritopsis nutricula1.

 

D’autres applications, cette fois-ci plus tangibles peuvent être citées pour dépeindre l’implication du transhumanisme au service de la médecine. La chirurgie esthétique n’a pas pour objectif de soigner un être humain, elle a cependant pour vertu de “l’améliorer” selon des critères sociaux parfois discutés.

 

Le domaine du militaire, à la recherche d’une constante innovation :

 

Bien évidemment, le domaine du militaire puise dans ce courant quelques inspirations intéressantes. Nous avons par exemple tous entendu parler des exosquelettes, véritables extensions du corps humain permettant à son hôte de dépasser ses capacités physiques. Par extension, tout objet permettant à l’humain d’éliminer les défauts de sa nature imparfaite rentre dans ce courant (comme en témoignent les travaux de l’Irsem II sous la présidence du professeur Jean Didier Vincent). Nous pouvons ainsi affirmer que les radars, les radios servant à la communication à distance et les armes de guerre font unanimement partie de l’extension de l’être humain. Les robots de Boston Dynamics venant en aide pour des problématiques de logistiques sont également un bon exemple pour illustrer les applications du transhumanisme dans le domaine de la défense. Ces progrès doivent être en accord avec certaines questions éthiques, c’est pourquoi un grand nombre de philosophes modernes dévouent leurs pensées à ce sujet.

 

 

Des controverses à l’aube du progrès :

 

Tant de portes ouvertes vers l’avenir attirent de nombreux avis divergents. L’Eglise catholique, par exemple, exprime son désaccord avec de telles pratiques : “le recours à la modification génétique pour produire un surhomme ou un être doté de facultés spirituelles essentiellement nouvelles est impensable, puisque le principe de la vie spirituelle de l’homme […] n’est pas produit par des mains humaines” (déclaration du Vatican de 2004). La problématique d’aller au-delà de la volonté de Dieu fait entrer la théologie dans le débat houleux du transhumanisme.

 

Une autre critique reposant sur le fait que l’humain ait peur de la mort est mise en lumière par l’essayiste français Jean-Claude Guillebaud. D’autres se fondent sur la surenchère technologique au service du bonheur éphémère de l’individu (exprimé par le théologien sociologue Jacques Ellul). Certains disent à leur tour que le transhumanisme mènera à la déshumanisation de notre espèce comme en témoigne cette citation “Plus nous nous sentirons impuissants et déprimés, plus nous serons tentés de nous tourner vers les machines.” (Alvin Toffler, sociologue et futurologue américain).

 

S’ajoute au grand débat des avis pessimistes méritant également une certaine visibilité, d’autres questions. L’amélioration de l’être humain le poussera-t-il à mener des guerres eugéniques ? Le futur nous portera-t-il les prémisses de stigmatisation due aux différences causées par le transhumanisme ? Un film des plus marquants met en exergue l’une de ses dérives dans une société future : Bienvenue à Gattaca de Andrew Niccol.

 

 

Que de questions et de perspectives pour notre avenir… Le transhumanisme, omniprésent dans la société, est un courant dont l’importance est croissante et d’ampleur pour le destin de l’humanité.

 

 

 

 

1 Turritopsis nutricula : Cette méduse unique découverte dans les Caraïbes est en effet capable de combattre la vieillesse en n’en inversant le processus. Sa particularité est donc sa capacité à revenir au stade de polype durant lequel elle régénère ses cellules et se clone pour se reproduire.

Marius Grosjean

Rédacteur chez Recherche et Avenir